En septembre 1973, le coup d’Etat de Pinochet contre le gouvernement d’Allende instaure une dictature qui durera 17 ans. Sous prétexte de barrer la route au communisme, Pinochet supprime la démocratie.
Concrètement, des personnes avec de fausses identités arrivaient avec des voitures sans immatriculation, entraient dans les domiciles, prenaient la personne, l’emportaient sans jamais dire où. Dans la sinistre Villa Grimaldi, une pièce appelée « la cuisine » était utilisée pour torturer des personnes : dans un coin, se trouvait le « grill », en fait un sommier en métal où on couchait les gens pour leur appliquer des electrodes en divers endroits du corps.
Dès le début, des organisations humanitaires chiliennes ont recueillies des informations sur les personnes disparues, torturées ou exécutées, mais aucunes actions en justice n’ont abouties.
En 1996, le procureur espagnol Castresana trouve un texte de loi qui permet à la justice espagnole d’intervenir dans n’importe quel pays du monde où serait pratiqué le génocide, la torture ou le terrorisme. Il décide alors d’instruire une plainte contre Pinochet. Les faits de 35 tortures sont suffisants pour faire l’objet d’une poursuite universelle.
En 1998 Pinochet est arrêté à Londres sur la demande du juge espagnol Garzon. Pour éviter l’extradition en Espagne, il nie sa responsabilité dans les crimes et rejette la culpabilité sur ses subordonnés. L’Angleterre analyse les preuves et annonce l’extradition de Pinochet.
L’espoir d’un procès bouleverse les victimes au Chili et dans le monde entier.
A quelques jours de son extradition, le ministre anglais de l’intérieur annonce son intention de ne pas extrader Pinochet qu’il considère comme gâteux et accorde sa libération. C’est le sommet : alors que l’affaire est réglée sur le plan judiciaire, les politiques rentrent en scène et disent aux tribunaux : c’est bon les gars, allez voir ailleurs, on va s’arranger entre nous pour que ce monsieur puisse rentrer chez lui sans être jugé ».
Le retour de Pinochet au Chili a mis en avant une évidence terrible : le maintient des institutions de la dictature avec des réformes qui n’en ont jamais modifié l’essence. A Santiago, des groupes de jeunes lancent des actions pour dénoncer les ex-tortionnaires, des professionnels de la répression encore en place à des postes de responsabilité.
En 2001, 5 ans après le début de la procédure lancée en Espagne, Pinochet est finalement arrêté et inculpé au Chili. C’est à ce moment que la première statue d’Allende est érigée à Santiago, devant le ministère de la Justice.
S’il n’y a pas eu de procès pour juger les responsables, la mémoire en revanche fait petit-à-petit le procès historique. De Pinochet mais aussi de tous ceux qui ont torturé, de tous les civils qui ont soutenus et continuent à le défendre, de tous ceux qui sont encore aujourd’hui en position de pouvoir.
PS : pour en savoir plus sur le sujet, je vous recommande les 5h de documentaire « La bataille du Chili » par Patricio Guzman qui retrace la chute du gouvernement Allende.